Ces épisodes concernent bien entendu les professionnels de l’eau, notamment au niveau du VSA. Face aux risques de voir ces conditions extrêmes se répéter, on ne peut que se poser la question: que faire? Avant d’envisager quelques pistes, revenons sur les impacts de la canicule.
Les épisodes de canicules ont des impacts très importants dans nos cours d’eau: nombre d’articles de journaux ont illustré le risque posé par l’augmentation des températures et le manque d’eau sur les populations piscicoles. D’un point de vue scientifique les processus sont bien connus. Les poissons peuvent tolérer une certaine augmentation graduelle de température (facteur d’acclimatation) pendant un certain laps de temps (temps d’exposition) et en fonction de leur stade de développement et de l’espèce concernée. Si ces seuils sont dépassés on assiste à des mortalités, à des niveaux plus ou moins élevés, dans les populations de poissons. Ces limites de température sont connues et bien documentées, on les retrouve dans la loi par exemple au niveau des rejets des centrales nucléaires dans les cours d’eau, dans les rejets des STEP ou dans les directives VSA sur les rejets pluviaux. Un effet sournois et peu documenté s’ajoute à la problématique des températures et du manque d’eau: la toxicité de nombreuses substances augmente en fonction de la température. Ainsi les espèces aquatiques sont triplement affectées par ces épisodes de canicules: augmentation des températures (jusqu’à des valeurs létales), diminution des débits et des zones de refuge, augmentation de l’effet des substances chimiques.
Pendant les épisodes de canicules les STEP sont relativement peu impactées, mais c’est au niveau des réseaux d’assainissement que de nombreux problèmes peuvent survenir. L’absence de débit dans les réseaux peut conduire à une accumulation des dépôts dans les canalisations. Avec les températures élevées, ces dépôts vont se décomposer et on va retrouver des odeurs fortes (hydrogène sulfuré). Il y a un risque élevé également pour le personnel d’exploitation par la présence de gaz dans les canalisations. Les premières pluies après les épisodes de canicules peuvent générer des impacts très importants au niveau des déversoirs d’orage: les matières accumulées dans les canalisations vont être emportées rapidement, générant une charge conséquente. S’il s’agit d’orage, comme c’est souvent le cas à la suite de ces épisodes de sécheresses, les déversements qui peuvent survenir vont finir dans des cours d’eau déjà limites en termes de capacité: les impacts de ces déversements seront fortement accentués. Il en est de même pour les systèmes séparatifs: les polluants accumulés sur les routes et les voies de communications seront mobilisés en peu de temps et pourront engendrer, dans des cours d’eau sensibles, des impacts conséquents.
Evidemment le but est de limiter à la source les émissions de CO2 afin de contenir les effets des dérèglements climatiques à un niveau aussi bas que possible. C’est un travail de tous les jours auquel nous devons tous contribuer. Au niveau du VSA nous proposons des solutions pour atténuer les effets des changements climatiques en milieu urbain: le projet Sponge City ou ville éponge valorise l’eau en milieu urbain, propose de développer la végétation et créer ainsi des ilots de fraicheur.
Le traitement avancé des micropolluants dans les STEP contribue également à limiter les impacts des polluants. Une amélioration constante des capacités épuratives de nos STEP fait partie de nos préoccupations. Maintenir des cours d’eau en bon état écologique, en favorisant les espaces de refuges par renaturation, permet de limiter ces impacts négatifs. L’ombrage des cours d’eau permet notamment de limiter de plusieurs degrés la température de l’eau.
La réutilisation des eaux usées en période de canicule est une solution adoptée par plusieurs pays. En France, par exemple, moins d’1 % de l’eau est réutilisée. C’est peu à côté de l’Italie (8 %) et de l’Espagne (14 %), mais les projets se multiplient. Ainsi, pour sauver 400 jeunes arbres récemment plantés de la sécheresse, la ville de Brest utilise depuis peu les eaux épurées. D’autres projets en Vendée vont jusqu’à la réutilisation des eaux usées épurées pour l’alimentation en eau potable. Ces solutions sont habituelles dans de nombreux pays, l’exemple le plus emblématique étant Singapour où 40% de l’eau potable provient des eaux usées.
Ce concept très connu de réutilisation des eaux usées fait des émules, mais soyons clair: en Suisse il est actuellement encore interdit de réutiliser les eaux des STEP pour l’irrigation, par exemple. Des discussions sont en cours pour faire évoluer la législation. Les épisodes de canicules qui tendent à se répéter vont nous obliger à utiliser la ressource eau de manière beaucoup plus ciblée et économe tout en tachant de limiter au maximum les conflits d’utilisation qui ne manqueront pas de survenir. Beaucoup de pain sur la planche pour ces prochaines années!
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