Plateforme pour l’eau, le gaz et la chaleur
News
22. mai 2024

qualité de l'eau

Jeux olympiques de Paris : va-t-on pouvoir nager dans la Seine ?

La saison estivale commence doucement, la baignade en plein air reprend ses droits. En Suisse, que ce soit dans l’Aar, le Rhône, le Rhin, La Limmat … se baigner au centre-ville est considéré comme parfaitement normal et participe à la qualité de vie en milieu urbain. Une autre News de ce mois revient sur cette question.

Dans l’actualité récente plusieurs journaux reviennent sur la problématique de la baignade en lien avec les Jeux Olympiques de Paris. C’est l’occasion de mettre en avant les enjeux de cette qualité des eaux de baignade en milieu urbain et de faire un parallèle avec  la situation actuelle en Suisse.

Dans le cadre des Jeux Olympique de Paris, la question de la baignade dans la Seine a pris une dimension politique très importante, générant des investissements pour plus de 1.4 milliards de francs. Pour mieux comprendre la problématique, un petit retour en arrière s’impose. La vidéo de l’INA (institut national de l’audiovisuel), en lien avec cet article, résume la situation. Ainsi, au XVIIème siècle, on se baignait dans la Seine à Paris. Au XIXème la priorité est donnée à la navigation. Au XXème la baignade est définitivement interdite en 1923 en raison "des dangers causés par la navigation fluviale et la pollution"

Plusieurs politiciennes et politiciens ont promis de rendre la Seine baignable, en commençant par Jacques Chirac en 1990. Anne Hidalgo a également promis en 2016 de s’y baigner dans le cadre des JO: les compétitions sportives dans la Seine représentaient un élément clé de la de la candidature française. Emmanuel Macron a également promis de se baigner dans Seine : une promesse à suivre.

 

Des investissements colossaux et des actions spécifiques

Des efforts colossaux ont été mis en œuvre pour optimiser le réseau d’assainissement parisien depuis les années 1990 afin de limiter la pollution provenant des eaux usées. Le SIAAP (Syndicat interdépartemental pour l'assainissement de l'agglomération parisienne) a investi près de six milliards de francs pour améliorer la situation. Son site (www.siaap.fr/) présente les enjeux de la baignade dans la Seine. Comme le mentionne le syndicat, les déversements dans la Seine ont déjà été réduits par dix depuis la fin des années 1990.

L’action centrale en lien avec les JO est la construction d’une immense rétention d’eaux mixtes (50'000 m3 de capacité). Les dimensions sont vertigineuses : 50 m de diamètres, 30 m de profondeur. Les 16 piliers qui soutiennent le tout s’enfoncent jusqu’à 30 m sous le bassin. D’un budget de 100 millions, cet ouvrage permet de capter les eaux unitaires de la ville lors des précipitations. L’implantation d’un tel ouvrage au centre de la ville est une prouesse d’ingénierie. Cependant, étant donné les surfaces collectées dans l’agglomération parisienne, cet ouvrage et ceux déjà en place ne permettent pas de collecter l’ensembles de précipitations : la qualité bactériologique des eaux de la Seine, qui sera particulièrement surveillée pendant les JO, ne pourra pas être assurée pour des événements de pluie de plus de 10mm environ. C’est une situation que l’on rencontre également en Suisse : en cas précipitations importantes, les rejets unitaires de nos réseaux peuvent également compromettre la qualité de la baignade.

D’autres actions ont été entreprises pour améliorer la qualité de la Seine. Ainsi, depuis 2018 une loi oblige bateaux et péniches à se raccorder au réseau d'assainissement pour ne plus déverser leurs eaux usées dans le fleuve. C’est également une obligation en Suisse. Selon la préfecture, la quasi-totalité des 250 propriétaires de bateaux devraient l'avoir fait à Paris d'ici aux JO. Une autre problématique est liée aux mauvais branchements des particuliers. D’après les estimations du SIAAP, quelque 35'000 maisons de banlieue proche évacuaient leurs eaux usées directement dans le milieu naturel. Grâce à des campagnes d’informations ciblées et des obligations de raccordement, 40% de ces mauvais branchements ont déjà pu être corrigés. Cette situation peut être considérée comme étonnante de ce côté-ci de la frontière : l’obligation de raccordement en Suisse conduit à un taux de branchement de plus de 99% en milieu urbain. La chasse aux mauvais raccordements est organisée dans le cadre des PGEE. La formation des spécialistes pour assurer l’évacuation correcte des eaux des biens-fonds bat son plein (une nouvelle version de la directive SN 592 000 sera publiée le 1er juillet). L’effort consenti au niveau de ces raccordement participe grandement à la bonne qualité de nos eaux de baignades et doit être poursuivi.

Autres mesures phares à Paris : la désinfection des eaux en sortie de STEP et des eaux pluviales, de façon à limiter fortement la contamination bactérienne (désinfection à l’acide performique pour les STEP et UV pour les eaux pluviales). Une telle solution existe également en Suisse au Tessin. La STEP de Bioggio est par exemple équipée d’un système de désinfection des eaux afin de préserver la qualité bactériologique du milieu récepteur pendant la période touristique (présence d’un camping en aval de la STEP). La mise en place d’un système de traitement des micropolluant pourra-t-elle permettre d’atteindre les mêmes objectifs sans recourir à un traitement supplémentaire ? L’avenir nous le dira.

Finalement des approches de type « Ville-éponge » fleurissent à Paris : cette solution à la source est indispensable pour notamment mieux gérer les quantités d’eaux générées par les précipitations.

Des effets positifs déjà atteints

Les investissements déjà consentis à Paris et dans sa région apportent peu à peu leurs effets au niveau du milieu récepteur. Une amélioration des teneurs en oxygène, une diminution des concentrations en ammonium et phosphate sont observées. Si la Seine n'est pas redevenue un « fleuve sauvage", elle compte aujourd'hui plus de 30 espèces de poissons, contre trois en 1970.

A partir de l'été 2025, trois sites parisiens et plus d'une vingtaine autour de la capitale dans la Seine et la Marne, son principal affluent, accueilleront des espaces sécurisés et aménagés avec accès à l’eau, douches et parasols. Même si la qualité bactériologique sera fortement dépendante des conditions météorologiques, ces aménagements en lien direct avec l’eau permettront d’améliorer sensiblement la qualité de vie des habitantes et habitants, à l’image de que l’on a l’habitude de vivre dans nos villes.

Les investissements et les efforts consentis dans le cadre des JO 2024 permettront non seulement de permettre aux politiciens de tenir leurs promesses, mais surtout de faire bénéficier la population d’une source de fraicheur et de bien-être bienvenue dans l’agglomération parisienne. Bon début de saison de baignade et n’oubliez pas votre maillot de bain lors de votre prochain séjour parisien !

Kommentar erfassen

Kommentare (0)

e-Paper

Avec l'abonnement en ligne, lisez le E-paper «AQUA & GAS» sur l'ordinateur, au téléphone et sur la tablette.

Avec l'abonnement en ligne, lisez le E-paper «Wasserspiegel» sur l'ordinateur, au téléphone et sur la tablette.

Avec l'abonnement en ligne, lisez le E-paper «Gasette» sur l'ordinateur, au téléphone et sur la tablette.