Environ un million de mètres cubes d’eau potable est distribué en Suisse chaque année. Cela représente envi-ron 162 litres d’eau potable par habi-tant par jour. L’accès à l’eau potable est un droit fondamental et doit bé-néficier d’une priorité élevée en cas de crise. Les impacts liés au dysfonc-tionnement des stations d’épuration peuvent également être très consé-quents en cas de pénurie d’électricité.
Les communes suisses utilisent environ 1,8 TWh d’électricité pour fonction-ner. Cette consommation représente environ 3,2% de la consommation nationale. L’Eawag (Institut Fédéral Suisse des Sciences et Technologies de l’Eau) a estimé qu’environ un tiers de la consommation d’une municipa-lité concerne le secteur de l’eau: 23% de la consommation municipale est due à la fourniture d’eau potable à ses habitants tandis que 14% de la consommation est dédiée au traite-ment des eaux usées en moyenne. La fourniture d’eau potable et le traite-ment des eaux usées sont donc liés étroitement à la fourniture d’élec-tricité. Jusqu’à aujourd’hui, l’accès à de l’énergie en quantité et en qualité suffisante n’a pas été une menace pour la fourniture d’eau potable et le traitement des eaux usées. Les risques d’ordre sanitaires et de protection de l’environnement sont depuis toujours pris au sérieus tandis que l’éventuali-té d’une pénurie énergétique n’a pas encore été à l’ordre du jour. Le sys-tème actuel n’est pas prêt à réagir en cas de blackout: des expériences en montrent ses limites dès le 2ème jour de crise (voir Reflets 01/2020).
Actuellement, l’approvisionnement en Ă©lectricitĂ© est assurĂ© en Suisse. La production indigène est basĂ©e prin-cipalement sur l’énergie hydraulique (55%) et l’énergie nuclĂ©aire (36%). Les perspectives Ă©nergĂ©tiques 2050 prĂ©voient de remplacer l’énergie nu-clĂ©aire et fossile par de l’énergie re-nouvelable. La situation peut devenir problĂ©matique en hiver car les cen-trales hydrauliques fonctionnent au ralenti Ă cause des prĂ©cipitations plus faibles (neige) tandis que la produc-tion photovoltaĂŻque est nettement infĂ©rieure en hiver qu’en Ă©tĂ©. Les stra-tĂ©gies de l’Office fĂ©dĂ©rale de l’énergie (OFEN) comptent sur de fortes im-portations d’énergie pour compenser le manque de production indigène. La Suisse bĂ©nĂ©ficie aujourd’hui d’accords avec ses voisins pour importer suffi-samment d’électricitĂ© pour assurer un service de qualitĂ© et de quantitĂ©. Mal-heureusement ces accords vont ĂŞtre Ă©chus prochainement et la situation pourrait devenir critique si rien ne change car la Suisse ne sera plus prise en compte dans la stratĂ©gie Ă©lectrique de l’Union EuropĂ©enne (UE). En effet, l’accord sur l’électricitĂ©, prĂ©parĂ© de-puis 2007, a Ă©tĂ© gelĂ© car l’UE le lie Ă l’accord institutionnel.Â
L’OFEN a préparé 3 scénarios de crise qui définissent une situation où la production hivernale est plus faible. En fonction d’un statuquo ou d’un ac-cord avec les entreprises électriques voisines, la Suisse risquerait une pé-nurie d’électricité et une sécurité opé-rationnelle (stabilité) mise en danger en cas de situation extrême. Concrè-tement, la situation du premier scé-nario (sans accord ni avec l’UE ni avec les entreprises électriques des pays voisins) met en danger la quantité et la sécurité de l’approvisionnement en électricité et fait peser un risque sur la distribution et le traitement de l’eau. Heureusement, le débat a été lancé et de nouvelles lois sont en consulta-tion (p.ex rémunération du stockage de l’énergie en hiver) et certaines mesures ont déjà été prises (p.ex. simplifier les procédure pour les structure prioritaires). De nouvelles stratégies sont étudiées à l’OFEN (p.ex. mini-centrales de couplage chaleur-force, etc).
La catastrophe annoncée sera donc probablement évitée mais il faut maintenant se poser la question de la sécurité de la fourniture de l’eau potable et le traitement des eaux usées en cas de crise énergétique. En cas de pénurie, la Confédération a chargé l’Association des entreprises électriques suisses (AES) de préparer une stratégie de crise. Il est donc né-cessaire pour les professionnels de la distribution et de la protection des eaux de prendre connaissance des répercussions des différentes mesures prévues.
Quelles que soient les solutions rete-nues, on constate que l’eau et l’éner-gie sont étroitement liées : des solu-tions innovantes pour limiter notre consommation électrique et assurer en tout temps un approvisionnement en eau et une épuration adéquate sont indispensables. Nous devons être innovants pour assurer un ave-nir serein dans l’exploitation de nos infrastructures!
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