En Suisse, l’eau potable provient à 40% de sources, à 40% d’eaux souterraines et à 20% d’eaux lacustres et fluviales. Mais à qui appartiennent les ressources en eau, qui est propriétaire de l’eau? Qui prend les décisions en la matière et qui a le droit d’utiliser l’eau?
En Suisse, les cantons sont souverains en matière d’utilisation de l’eau. Les eaux superficielles, à savoir les lacs, les rivières et les ruisseaux, sont en principe placées sous la souveraineté de chaque canton. D’importants cours d’eau et bassins d’eaux souterraines, qui font la richesse en eau et constituent les réserves en eau potable de régions entières, font également partie des eaux publiques. Des ressources en eaux souterraines de cet ordre ne peuvent en principe pas être des propriétés privées. Cette jurisprudence est motivée par la préservation de l’intérêt public sur un bien indispensable à la vie de la collectivité.
Les petites ressources en eau souterraine ayant une présence locale faible ou limitée à quelques terrains peuvent toutefois être considérées comme des eaux privées. Il faut toujours vérifier au cas par cas si le droit cantonal concrètement applicable ne permet pas de déclarer de telles ressources comme étant publiques.
Selon le code civil, une source appartient au propriétaire du terrain et peut constituer ainsi une ressource d’eau privée. Mais si la source a un certain débit, le canton peut la déclarer publique.
La distribution d’eau est une mission d’ordre public dont la responsabilité se trouve entre les mains des communes. Dans le cadre de la législation cantonale, cette mission peut également faire l’objet d’une délégation, par exemple à des distributeurs d’eau privés tels que des coopératives ou des sociétés anonymes. Dans ce cas, les obligations légales et le principe de la couverture des coûts sont délégués eux aussi. La responsabilité de la distribution d’eau reste cependant entièrement du ressort de la commune. La plupart des sociétés anonymes qui exploitent aujourd’hui une distribution d’eau en Suisse sont l’entière propriété des pouvoirs publics (privatisation formelle).
Tous les distributeurs d’eau ont l’obligation de respecter les critères de qualité en vigueur conformément à la législation sur les denrées alimentaires. Le prix est impressionnant, puisque 1000 litres d’eau potable coûtent 2,30 francs en moyenne en Suisse, soit environ 30 centimes par personne et par jour. Grâce à la protection préventive des ressources en eau potable, aucun assainissement onéreux n’a été nécessaire à ce jour.[U61] C’est pourquoi l’association des distributeurs d’eau SSIGE se bat pour un renforcement de la protection des ressources en eau naturelles face aux menaces actuelles que constituent par exemple les pesticides ou les nitrates.
Comme tous les utilisateurs d’eau, les distributeurs d’eau doivent obtenir une concession auprès du canton et payer une redevance correspondante pour utiliser les réserves d’eau publiques.
Indépendamment du modèle d’exploitation et de la forme juridique, la distribution d’eau constitue un monopole naturel. Il ne peut donc par nature pas y avoir de concurrence, étant donné que le marché dysfonctionne. C’est pourquoi les pouvoirs publics doivent contrôler et réguler le monopole.
La valeur de remplacement des infrastructures de distribution d’eau en Suisse se monte à plus de 50 milliards de francs. Ces valeurs ou «assets» ont été mis en place durant des décennies grâce à une facturation couvrant les coûts. Env. 925 millions de francs en moyenne sont investis chaque année pour le maintien de la valeur des infrastructures de distribution d’eau potable. En moyenne, le niveau actuel des investissements des communes en matière d’entretien et de maintien de la valeur de la distribution d’eau suffit pour assurer une exploitation technique durable du système. La qualité de gestion de l’exploitation en Suisse est également excellente et l’autogestion de la branche fonctionne bien. La qualité de l’eau potable est au rendez-vous, comme le confirment régulièrement des organes indépendants.
L’association des distributeurs d’eau SSIGE ne voit aucune nécessité, tant technique qu’économique, d’encourager une privatisation totale ou partielle dans le secteur de la distribution d’eau. Le risque que des entreprises privées soient principalement intéressées par le profit et la prise d’influence ne doit pas être pris à la légère. L’association des distributeurs d’eau travaille toutefois concrètement à encourager les développements structurels et le niveau de formation qui permettront de poursuivre la professionnalisation de la gestion de l’exploitation et de la sécurité de la distribution d’eau.
Chaque année, les Nations Unies organisent la Journée mondiale de l’eau le 22 mars afin d’attirer l’attention du grand public sur les objectifs mondiaux de l’Agenda 2030 pour le développement durable et leurs implications locales, ainsi que sur les objectifs qu’ils contiennent et qui sont liés à l’eau, ratifiés par la Suisse. Le sixième objectif de développement durable «Water for all by 2030!» passe avant tous les autres. Selon ce dernier, la disponibilité et la gestion durable de l’eau, ainsi qu’un assainissement doivent être assurés pour tous les citoyens d’ici 2030. Par «tous les citoyens», l’ONU entend l’ensemble de la population mondiale, y compris les groupes de population souvent négligés et fragiles que sont les femmes, les enfants, les personnes âgées, les malades, les réfugiés, les minorités ethniques ou religieuses et bien d’autres encore. Il existe également des millions de personnes «pauvres», c’est-à -dire disposant de moins d’1,25 USD par jour et dont le seul approvisionnement en eau potable s’effectue sous forme d’eau en bouteilles – alors qu’une quantité suffisante d’eau potable conditionnée de cette manière dépasse largement le budget quotidien d’une famille.
Selon le rapport de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et de l’Organisation d’aide à l’enfance des Nations Unies (Unicef) sur la situation en matière de distribution d’eau potable et assainissement dans le monde, 844 millions de personnes n’avaient toujours pas accès au plus simple approvisionnement en eau en 2017: les personnes concernées ne disposaient pas des 20 à 50 litres d’eau par jour et par personne que l’OMS juge nécessaires pour couvrir les besoins vitaux et en matière d’hygiène. Près de 2,3 milliards d’êtres humains ne disposent pas d’assainissement et de traitement des eaux usées adaptés. La raréfaction croissante des ressources en eau a en partie des causes naturelles : le changement climatique ou les périodes de sécheresse qui ont frappé des régions d’Inde et du Pakistan ou le Sud de l’Afrique ces dernières années.
Mais cette pénurie peut aussi être en partie imputée à des causes humaines, par exemple dans les régions où des déforestations excessives ou une irrigation intensive des cultures ont fortement fait baisser le niveau des eaux souterraines, ou encore dans les cas où ce bien précieux est gaspillé. Selon les estimations des experts de l’ONU, 5 milliards de personnes souffriront d’un manque chronique d’eau d’ici 2030.
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