Les pesticides, restes de médicaments et autres résidus de substances chimiques [1], appelés composés traces organiques ou micropolluants, doivent, depuis l’entrée en vigueur de la législation en matière de protection des eaux du 1er janvier 2016 (LEaux [2] et OEaux [3]), être éliminés à hauteur de 80% dans certaines stations d’épuration (STEP) en Suisse. Pour réaliser cet objectif, il existe actuellement deux filières principales de traitement des micropolluants qui sont mises en œuvre en Suisse: le traitement par charbon actif et l’ozonation. Le charbon actif existe sous forme de poudre (CAP), de micrograin (CAµG) ou de grain (CAG). Il existe pour le moment plusieurs filières avec ces procédés, mais très peu combinent les deux. Des essais pilotes mettant en avant cette combinaison ont été réalisés à la STEP des SITSE (Commugny VD) entre janvier 2022 et août 2023. Cet article détaille les différentes étapes du projet, de la mise en route aux résultats finaux.
La STEP des Services Industriels de Terre Sainte et Environs (SITSE) se trouve sur la commune de Commugny dans le canton de Vaud. Elle traite les eaux des communes de Bogis-Bossey, Coppet, Chavannes-de-Bogis, Commugny, Crassier, Founex, Mies, Crans, La Rippe, Chavannes-des-Bois, Tannay et Céligny. La construction de la nouvelle STEP des SITSE qui centralise le traitement de toutes les communes s’est achevée en 2014. La chaîne de traitement comprend aujourd’hui un prétraitement mécanique, une décantation primaire, un traitement biologique par boues activées et une décantation secondaire. La STEP traite actuellement les eaux usées de 23 000 habitants. La population raccordée à la STEP évolue et la station atteindra dans les prochaines années la barre des 24 000 habitants, synonyme d’obligation légale pour la mise en place du traitement des micropolluants.
Dans ce cadre, les sociétés OTV VEOLIA et CSD Ingénieurs SA ont proposé aux SITSE d’organiser un essai pilote de 20 mois afin de tester un procédé de traitement avec mise en œuvre de charbon actif micrograin en lit fluidisé ainsi que la combinaison de ce traitement avec une ozonation. L’objectif était de tester ce procédé à l’échelle industrielle in situ dans le but d’analyser les résultats d’un tel procédé avec les eaux de la STEP. La société OTV VEOLIA a proposé de mettre en œuvre le procédé OPACARB® FL. Ce procédé a déjà été mis en œuvre dans des usines d’eau potable. CSD Ingénieurs a pour sa part suivi le montage et l’exploitation du pilote ainsi que l’analyse des résultats obtenus.
Le procédé OPACARB® FL est un traitement par adsorption sur charbon actif en micrograin en lit fluidisé. Le dimensionnement du procédé permet de fonctionner à des vitesses de filtration importantes (20–40 m/h). Cette grande vitesse de filtration permet d’assurer une fluidisation complète du charbon actif et ainsi de limiter au maximum toute stratification du charbon actif [4], ceci dans le but d’assurer un traitement le plus homogène possible et un renouvellement plus efficace. Cette fluidisation optimale a également pour effet de ne pas retenir les matières en suspension (MES) qui traversent le lit de charbon actif en micrograin. Ce dernier nécessite donc peu de lavage. De plus, la vitesse de filtration élevée permet de réduire au maximum l’emprise au sol du procédé. Un dispositif spécifique en amont du pilote permet par ailleurs de procéder à une injection d’ozone. Avec un temps de contact inférieur à 30 secondes et une concentration injectée de 1 ppm d’ozone, cet ajout doit permettre d’améliorer les capacités d’adsorption du charbon actif tout en limitant le risque de formation de sous-produits [5].
Dans le cas présent, l’eau industrielle de la STEP a été utilisée (eau de sortie du clarificateur, puis tamisée sur un filtre à bougie). Le pilote (voir photo de titre ainsi que fig. 1 et 2) est constitué d’une colonne de 4,5 m de haut partiellement remplie avec du charbon actif en micrograin (100 kg de charbon actif dans le cas présent).L’eau à traiter est introduite à la base du pilote après avoir été comptée par un débitmètre. Un système répartiteur permet à l’eau d’être injectée dans le pilote de manière homogène. Le pilote est prévu pour fonctionner dans une gamme de débit de 2–4 m3/h. Une zone de tranquillisation au-dessus du lit est également nécessaire pour éviter les fuites de particules de charbon actif en micrograin car les eaux traitées sont ensuite directement rejetées au lac. Afin de s’assurer qu’aucune particule de charbon actif en micrograin ne s’échappe, un pack lamellaire est installé au sommet de la colonne comme sécurité complémentaire.
Grâce à un jeu de vannes en amont du pilote, il est par ailleurs possible de faire passer l’eau dans un Venturi dans lequel est injecté de l’ozone (concentration injectée de 1 ppm; fig. 2). L’eau ozonée circule ensuite dans une colonne de contact avant d’être injectée à la base du pilote. La colonne de contact est équipée d’un dégazeur en partie haute. L’ozone résiduelle est neutralisée dans une colonne de charbon actif en micrograin et d’eau adjacente au pilote.
Un ensemble de sondes (température, pH, turbidité et absorbance UV) en amont et aval du pilote permet de mesurer en continu une série de paramètres du traitement.
Les essais ont débuté en janvier 2022 par une période de 6 mois de mise en régime du charbon. Durant cette période, le charbon a été renouvelé afin d’arriver à un âge moyen de charbon équivalent à celui qu’on retrouve en exploitation dans le but de ne pas fausser les résultats avec un taux de charbon neuf trop important.
Le pilote a été initialement chargé avec 100 kg de charbon régénéré (Microsorb 400R, Chemviron) et renouvelé par la suite à un taux de dosage de 10 mg de charbon actif en micrograin par litre d’eau traitée (10 mg/l).
Un contrôle inter-laboratoire a été réalisé sur une série des premiers et des derniers essais afin de s’assurer qu’il n’y ait pas de biais analytique. Les résultats de cet exercice ont été très concluants (écart quasi inexistant).
Mise en route du pilote et début de la mise en régime du charbon actif micrograin (renouvellement du charbon actif micrograin afin que son âge moyen soit similaire à celui qu’on retrouve lors d’une utilisation industrielle lors des essais).
Essais avec une vitesse de filtration de 20 m/h avec un taux de dosage de 10 mg/l, sans ozone. C’est dans cette période qu’un contrôle inter-laboratoire a été réalisé.
Essais avec une vitesse de filtration 30 m/h avec un taux de dosage de 20 mg/l, sans ozone.
Essais avec une vitesse de filtration 30 m/h avec un taux de dosage de 20 mg/l, avec ozone.
Les essais ont été espacés dans le temps pour que le pilote soit pour chaque essai dans des régimes de fonctionnement stables (taux de renouvellement constant, etc.).
Des analyses cantonales sont régulièreÂment faites à la STEP et indiquent un faible abattement des substances indicatrices dans la biologie. Afin d’assurer un traitement respectant la norme de traitement des micropolluants, le procédé pilote devra abattre comme objectif au minimum 80% des micropolluants.
La variation de température au long de l’année a influé sur l’expansion du charbon et donc sur le temps de contact. La viscosité de l’eau froide étant plus faible, le charbon s’expanse davantage en hiver. Le temps de contact a donc varié, en fonction des saisons et des débits, entre 7 et 9 minutes (fig. 3).
Malgré les différentes variations de temps de contact, aucune différence de performance n’a été remarquée. Un temps de contact de l’ordre de 8 minutes semble suffisant pour réaliser l’objectif de traitement de 80% de diminution des micropolluants.
Un des avantages théoriques d’un traitement en lit fluidisé est l’homogénéité du lit de charbon actif micrograin. Cela permet d’éviter la stratification du charbon actif micrograin et facilite son renouvellement. Le diamètre moyen des grains de charbon actif d’un échantillon de charbon neuf a donc été comparé à du charbon actif prélevé au bas, milieu et sommet du lit fluidisé à la fin des essais (tab. 1). Cette analyse permet de conclure qu’une bonne fluidisation est bien en place et que le charbon n’est pas hétérogène entre le haut et le bas du lit.
Echantillons de charbon |
Diamètre moyen des particules |
Granulométrie | ||||
>850 μm | 850–600 μm | 600–425 μm | 425–300 μm | <300 μm | ||
[μm] | % | % | % | % | % | |
Neuf | 600 | 2 | 34 | 44 | 19 | 1.2 |
Sommet du lit | 600 | 0.3 | 28 | 60 | 12 | 0.2 |
Milieu du lit | 600 | 1.9 | 46 | 45 | 7 | 0.1 |
Base du lit | 600 | 0.5 | 29 | 59 | 12 | 0.3 |
Un des enjeux de ces essais pilotes était de prouver qu’une fluidisation optimale (grâce à une vitesse de filtration élevée) permettrait de ne pas accumuler les MES afin de réduire au maximum les lavages qui réduisent la disponibilité du traitement. Aucun lavage du lit de charbon actif micrograin n’a été effectué durant toute la durée des essais (20 mois).
Une fuite de particules de charbon actif micrograin (à la suite d’une trop grande vitesse de filtration par exemple) serait également dommageable. Pour vérifier cela, des analyses de MES en entrée et en sortie du pilote ont été réalisées pour chaque échantillon. Les résultats similaires obtenus en entrée et en sortie laissent penser qu’il n’y a pas de rétention de MES dans le procédé ou de fuite de charbon actif. En complément, une sonde de turbidité a été installée en amont et en aval du pilote. Ces sondes ont en permanence indiqué des valeurs équivalentes.
De plus, des analyses ponctuelles de pertes de charbon actif en micrograin ont été réalisées avec la méthode MIPAC par la Haute école spécialisée Fachhochschule Nordwestschweiz (FHNW) et les équipes du Michael Thomann. Différents échantillons ont été envoyés à la FHNW, provenant de deux installations différentes (SITSE et usine d’Eau potable de Rennes) pour comparaison avec une unité industrielle déjà en fonctionnement (tab. 2 et fig. 4). Enfin, le tableau 3 présente le contrôle de la qualité, un standard interne à la FHNW ayant été mesuré en plus des échantillons. L’étalon interne se compose de 0,2 mg/l de CAP et de 0,5 mg/l de poudre MES et devrait toujours résulter dans la même valeur de concentration.
Ce travail comparatif nous permet de conclure à l’absence de fines (concentrations inférieures à la LOQ) de charbon actif micrograin dans l’eau traitée du procédé OPACARB® FL (voir tab. 2).
Date Prélèvement d’échantillons |
CPAK [mg/l] Mesures et corrigée |
Rennes 1-4 | <O.1 (=LOQ) |
Rennes 2-4 | <O.1 (=LOQ) |
Rennes 3-4 | <O.1 (=LOQ) |
Rennes 4-4 | <O.1 (=LOQ) |
SITSE 30.07.23 | 0.2 |
SITSE 30.07.23 – 10 μm filtrée |
<O.1 (=LOQ) |
Â
Date Prélèvement d’échantillons |
CPAK, réel, mesures [mg/l] Mesures individuelles standard interne |
Rennes 1-4 – 4-4 | 0.20 |
SITSE 30.07.23 | 0.21 |
SITSE 30.07.23 – 10 μm filtrée |
0.21 |
Après avoir réalisé ces vérifications, il apparaît que la fluidisation optimale du charbon dû à sa grande vitesse de filtration limite grandement les risques d’accumulation de MES dans le réacteur sans pour autant créer des fuites de charbon actif micrograin en sortie de traitement pour autant qu’une importante hauteur de tranquillisation soit existante.
Lors de la durée des essais, peu d’évènements significatifs de pluie ont été mesurés. Aucune conclusion ne peut donc être faite sur le comportement du traitement lors d’épisodes pluvieux.
Afin de déterminer le taux d’épuration atteint par l’installation pilote, les douze substances de l’ordonnance du DETEC (RS 814.201.231; [6]) ont été mesurées dans l’eau avant (fig. 5) et après le traitement. Il est important de relever que lorsque la limite de quantification du laboratoire est atteinte (10 ng/l), cette valeur est utilisée pour les calculs d’abattement. De manière générale, c’est toujours la valeur la plus conservatrice qui a été prise pour tous les calculs dans ces essais. Pour cette raison, aucune moyenne d’abattement ne peut atteindre 100% et cela diminue donc la moyenne générale, surtout lors des essais avec un fort taux de renouvellement et avec l’ajout d’une ozonation.
Sur la base des valeurs mesurées, le taux d’abattement a été calculé avec la méthode de l’OFEV:
ainsi qu’avec la méthode des services de l’environnement du canton de Zurich (AWEL). Les deux méthodes donnent des résultats sensiblement identiques.
Le charbon actif micrograin a été renouvelé une fois par semaine. Une légère réduction de 1–2% de l’efficacité moyenne du traitement des micropolluants semble se produire entre deux périodes de renouvellement. Un renouvellement hebdomadaire de charbon actif micrograin parait suffisant.
Les trois tests suivants ont été réalisés dans l’installation pilote afin de déterminer le taux d’abattement des microÂpolluants:
L’abattement des micropolluants lors des différents essais est présenté dans la figure 6.
Le premier essai a montré des résultats intéressants avec un taux de renouvellement de charbon actif faible (fig. 7). Il permet de constater que le procédé OPACARB® FL traite certaines molécules facilement alors que d’autres substances (Candésartan, Irbésartan) ne sont que faiblement adsorbées.
La deuxième série d’essais atteint de manière presque systématique les objectifs fixés (fig. 8). Une grande partie des douze substances sont adsorbées jusqu’au seuil de quantification de manière systématique. Les substances difficilement adsorbables lors des premiers essais sont mieux adsorbées, mais sont toujours mesurées après traitement.
Le dernier essai est totalement concluant avec une moyenne d’abattement supérieure aux objectifs de traitement (fig. 9). L’ajout d’ozone en amont du traitement améliore de manière systématique le traitement et améliore l’homogénéité des performances. De plus, l’ozone permet égaleÂment de traiter de manière concluante toutes les molécules, même les plus rétives, à l’adsorption. L’ozone est donc un vrai plus pour ce type de procédé, car sa présence optimise non seulement les performances, mais aussi permet des gains de coût d’exploitation.
Les moyennes d’abattement du Candésartan représentent parfaitement l’évolution au cours des trois essais (fig. 10). On constate que l’ozone, additionnellement à son action sur l’adsorption, permet de diminuer l’écart-type des résultats. Cet effet de réduction des écarts-type dans les résultats peut aussi se constater sur la figure 11 qui reprend les résultats des moyennes d’abattement des micropolluants et les valeurs minimum et maximum associées. Il faut encore une fois rappeler que la limite de quantification du laboratoire limite le pourcentage d’abattement moyen à 90%.
Des analyses bactériologiques ont été réalisées afin de comparer la qualité d’eau après traitement avec et sans l’adjonction d’ozone. Ces dernières semblent indiquer une forte réduction de l’ordre de 90% des bactéries E. coli lors de l’ajout d’ozone alors qu’il n’y a pas d’effet de réduction sans ozone. On observe la même chose pour les entérocoques fécaux. Il s’agit là d’un effet supplémentaire de l’ozone qu’il est intéressant de constater.
Afin de déterminer le taux optimal de renouvellement du charbon, une série d’essais supplémentaires avec l’ozone, mais un taux de renouvellement de charbon actif moindre, serait intéressant pour quantifier au mieux le gain obtenu sur la consommation de charbon grâce à l’ajout de l’ozone. Cependant, nous pouvons d’ores et déjà estimer le gain à 20 ou 30% de charbon actif, et ce, à performances égales.
La vitesse de filtration maximale du pilote n’a pas été testée faute de hauteur sous plafond. De nouveaux essais à 40 m/h seraient également intéressants afin de tester les limites du procédé en conditions hydrauliques extrêmes.
Les différents objectifs de ces essais ont été atteints. En premier lieu, ces essais ont prouvé que ce procédé de traitement des micropolluants peut assurer la performance d’épuration demandé par l’ordonnance du DETEC [6], et ce, à des dosages de charbon actif micrograin similaires à ceux d’installations existantes et pour des temps de séjour hydraulique significativement moindre.
Ils ont par ailleurs permis de démontrer la fluidisation optimale et totale obtenue grâce à ce procédé OPACARB® FL (vitesse de 20 à 30 m/h). Il a été constaté une absence de colmatage du lit fluidisé par les MES et donc des besoins en nettoyage du lit de charbon actif moins fréquent que sur d’autres installations. La combinaison de ce procédé avec une faible injection d’ozone (environ 0,1– 0,2 g O₃ /g COD) en amont du lit fluidisé améliore la qualité et la régularité du traitement des micropolluants. Il y a un intérêt économique à mettre en œuvre cette injection d’ozone selon les configurations, car elle permet de réduire la consommation de charbon de 20 à 30% à performance égale. De surcroit, les effets bénéfiques de l’ozone sur la bactériologie sont intéressants pour des objectifs de réutilisation de l’eau (water reuse) par exemple.
La vitesse de fluidisation et la compacité du procédé permet également de réduire l’emprise au sol de ces installations comparativement à d’autres procédés utilisant du micrograin ce qui peut se révéler utile dans certains projets. Ceci permet aussi de la souplesse d’exploitation lors des phases transitoires ou bien en temps de pluie.
[1] Abegglen, C.; Siegrist, H. (2012): Micropolluants dans les eaux usées urbaines. Etape de traitement supplémentaire dans les stations d’épuration, Office fédéral de l’environnement. Berne, Connaissance de l’environnement, n° 1214, p. 87
[2] Loi fédérale du 24 janvier 1991 sur la protection des eaux (RS 814.20, LEaux), état au 01/02/2023
[3] Ordonnance fédérale du 28 octobre 1998 sur la protection des eaux (RS 814.20, OEaux), état au 01/02/2023.
[4] Gaid, K. et al. (2019): Réacteurs fluidisés à charbon actif, Théorie et applications, L’eau, l’industrie et les nuisances 422: 93
[5] Gaid, K.; Sauvignet, P. (2018): OPACARB® FL: une nouvelle génération de réacteur à charbon actif, L’eau, l’industrie et les nuisances 416: 71
[6] Ordonnance du DETEC concernant la vérification du taux d’épuration atteint avec les mesures prises pour éliminer les composés traces organiques dans les stations d’épuration des eaux usées du 3 novembre 2016 (RS 814.201.231), état au 01/02/2023
Le succès de ces essais pilote n’aurait pas été possible sans le support des différentes entités suivantes: SITSE, Eawag, FHNW et CSD.
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