La Haute école d’ingénierie et de gestion du Canton de Vaud (HEIG-VD), ainsi que la Haute école spécialisée du Canton du Valais (HES-SO Valais-Wallis) ont lancé, dès la fin de l’année 2022, le projet FOSTER_DHN avec le soutien financier de l’Office fédéral de l’énergie (OFEN), des Villes d’Yverdon-les-Bains et de Lausanne, ainsi que de la Direction de l’énergie du Canton de Vaud (DIREN). Le projet a commencé en novembre 2022 et durera jusqu’à l’automne 2024.
La question scientifique et technique fondamentale que FOSTER_DHN abordera est la suivante: comment accélérer l’intégration des sources d’énergie renouvelables dans les réseaux de chauffage à distance (CAD) et réduire les niveaux de distribution de température, en tirant parti des synergies possibles entre les réseaux? La mise en place de réseaux de chauffage urbain est un élément central de la stratégie de décarbonisation dans la plupart des pays européens, y compris en Suisse. En effet, l’implémentation du CAD permet de substituer massivement des chauffages individuels fonctionnant sur la base de chaudières alimentées par des énergies fossiles, ainsi que de viser à une plus grande efficacité globale par le biais d’installations centralisées. Les niveaux de distribution à basse température – ou, du moins, considérablement réduits par rapport à la situation actuelle – et l’utilisation accrue des sources d’énergies renouvelables comptent parmi les principaux facteurs favorables aux réseaux de chauffage urbain modernes, de même que la valorisation des sources de chaleur résiduelle (provenant, par exemple, de sites industriels ou de centres de calcul) [1]. Les réseaux thermiques évoluent parallèlement vers des systèmes énergétiques intelligents, interagissant avec d’autres réseaux énergétiques disponibles sur un territoire donné. Les réseaux de chauffage urbain devraient apporter une contribution importante à la décarbonisation du secteur du chauffage et, par conséquent, à l’objectif net zéro pour la Suisse [2]. Par conséquent, FOSTER_DHN étudiera des scénarios de réseaux de chauffage urbain avec des émissions de gaz à effet de serre minimales, en tenant compte des bilans énergétiques et d’émissions à différentes échelles de temps, y compris pour l’énergie électrique (par exemple, nécessaire pour les pompes à chaleur centralisées ou décentralisées).
Cependant, la plupart des réseaux de chauffage urbain sont actuellement exploités à des températures élevées (parfois bien supérieures à 120 °C), en raison soit de contraintes d’approvisionnement, soit de la présence de bâtiments (par exemple, des logements non rénovés) ou de clients spécifiques (par exemple, des hôpitaux) nécessitant des niveaux de température élevés. Sur le plan technique, il existe un certain nombre de modèles, parfois très élaborés, qui sont utilisés pour concevoir et dimensionner les réseaux de chauffage urbain, tant du point de vue hydraulique que du point de vue de l’approvisionnement en énergie. Néanmoins, la grande majorité des approches de simulation ne prennent pas en compte les niveaux de température multiples et les points d’injection, qui sont des aspects-clé pour étudier l’intégration de sources renouvelables telles que l’énergie géothermique et solaire, ainsi que les potentiels de chaleur résiduelle et fatale. En effet, les réseaux qui intègrent ces sources ne seront pas alimentés par une seule, souvent grande, centrale de production, comme c’est le cas pour les CAD alimentés par des usines d’incinération, par exemple. En outre, à notre connaissance, aucune étude systématique n’a abordé les méthodes visant à identifier et à développer les synergies possibles entre les petits réseaux de chauffage urbain, afin de réduire les dépenses d’investissement et d’exploitad’exploitation. De telles synergies peuvent également donner des pistes pour diminuer les niveaux de température de distribution et pour utiliser les ressources locales plus efficacement à des échelles temporelles et spatiales. Afin d’atteindre ces objectifs, le projet vise à intégrer des modèles de simulation pour les réseaux CAD, notamment sur la base de projets existants, parmi lesquels on peut citer le projet IntegrCiTy [3]. Il tentera également de comparer des outils existants et des bonnes pratiques d’utilisation de ces derniers.
BasĂ© sur l’expĂ©rience de l’Institut des Ă©nergies de la HEIG-VD et de la HES-SO Valais-Wallis dans la collaboration avec les villes et les services publics sur des projets CAD concrets (rĂ©novations, nouvelles constructions), le projet FOSTER_ DHN consiste en une approche Ă trois volets visant Ă Ă©tudier les axes suivants:Â
L’équipe de projet travaille en contact étroit avec deux villes partenaires, à savoir Yverdon-les-Bains et Lausanne (voir chapitres sur les cas-test) notamment au niveau des données, des scénarios et des indicateurs à développer. De plus, l’Institut des énergies de la HEIG-VD collabore
étroitement avec le programme SWEET (SWiss Energy research for the Energy Transition) DeCarbCH, qui explore toutes les possibilités de décarbonner le secteur du chauffage en Suisse et de diminuer sa consommation globale, parmi lesquelles figure l’utilisation accrue des CAD. Enfin,
un troisième cas d’application est prévu dans une ville du Canton de Neuchâtel, dans le cadre d’un travail de master se déroulant à la HEIG-VD.
Dans la deuxième partie, les partenaires évalueront:
En effet, de nouveaux réseaux et des extensions de réseaux seront envisagés en incluant différents scénarios, ainsi que des réseaux anergie dans des endroits appropriés:
Les niveaux de température dépendent de l’état des bâtiments. Dans ce sens, l’impact de l’évolution de la demande de chaleur future sera pris en compte dans FOSTER_DHN. Cependant, les impacts des politiques énergétiques sur la demande ne seront pas étudiés car il s’agit précisément du rôle de SWEET DeCarbCH.
Enfin, la troisième partie est la plus innovante car elle affronte la problématique suivante: en raison des coûts d’investissement élevés et de la disponibilité des ressources locales, les zones urbaines seront très probablement chauffées par une série de petits réseaux CAD, contrairement aux grands réseaux urbains déjà existants. Il sera donc nécessaire d’identifier et d’exploiter les synergies potentielles entre ces réseaux. Les réseaux peuvent être exploités de manière plus efficace, tout en maximisant l’intégration des sources renouvelables, avec une optimisation significative des dépenses d’investissement et d’exploitation et une résilience accrue. Toutefois, la planification et l’exploitation d’un système de chauffage urbain multi- réseaux posent des problèmes:
Chaque réseau étant connecté à au moins une source de chaleur, l’ensemble du système doit être considéré comme un système multi-injection. Chaque source de chaleur doit être planifiée et exploitée en tenant compte des autres et l’ajout éventuel de capacités de stockage.
La figure 1 illustre la connexion entre les trois modules de travail. Comme indiqué, différents réseaux de chaleur sont connectés via un point d’interaction. Les réseaux ont des sources de chaleur et des niveaux de température différents, en fonction des points d’approvisionnement et de production. Chaque réseau devrait pouvoir fonctionner seul, mais pourrait bénéficier d’une interaction avec d’autres réseaux, que ce soit en termes d’efficacité, de réduction des émissions ou de edondance.
Les réseaux de chauffage urbain gérés et planifiés pour les années à venir par Yverdon Energies seront considérés comme le premier cas-test de ce projet, afin de valider l’approche FOSTER_DHN dans une situation urbaine où la plupart des réseaux de chauffage urbain sont encore en phase de planification et de conception, avec une mise en service prévue dans les 5 à 10 prochaines années, comme illustré par la figure 2. Par ailleurs, la Ville d’Yverdonles- Bains a créé une société qui s’occupe spécifiquement du développement du CAD, Y-CAD SA, en partenariat avec les Services industriels de Genève. Parmi les objectifs du cas-test d’Yverdonles- Bains, on retrouve:
Le 2e cas-test du projet se concentrera sur le développement d’un nouveau réseau CAD alimenté par les rejets thermiques d’un centre de calcul. Outre l’étude de ce cas spécifique pertinent par rapport aux objectifs du projet, son intégration dans le réseau CAD historique opéré par les Services industriels de Lausanne sera également abordée, selon la planification présentée à la figure 3. Ainsi les objectifs poursuivis seront notamment:
Les équipes de projet sont en plein travail pour obtenir les premiers résultats du projet FOSTER_DHN. Les données de deux cas-test ont été recueillies, validées et structurées afin de pouvoir être utilisées par les modèles de calcul. Les premiers tests de validation de ces derniers ont été menées à bien. De même, les réflexions sur les possibilités de remplacement des énergies fossiles dans l’alimentation des réseaux CAD ont débuté, avec la mise en place d’un arbre décisionnel qui puisse servir les acteurs du terrain. Les discussions avec les villes partenaires ont permis de fixer les contours des scénarios qui seront analysés en détail. L’équipe de projet vise à établir des modèles de calcul qui soient utilisables par les ingénieur(e)s des entreprises énergétiques à la fin du projet. L’objectif est celui de pouvoir mettre en évidence les «best practices» et de donner des réponses concrètes sur les possibilités d’abaissement de température des réseaux CAD et l’intégration des énergies renouvelables. Chaque territoire est bien entendu spécifique et l’approche proposée par FOSTER_DHN ne donnera pas lieu à une solution «one-fits-all». Toutefois, elle a l’ambition de pouvoir identifier les problématiques les plus importantes et de mettre en évidence les pistes de solutionnement possibles sur ces thèmes cruciaux.
[1] OFEN (2021): Potentiel des installations de chauffage et de refroidissement à distance.
[2] AEE Suisse (2020): Réalisable et finançable. Le chauffage en 2050 – décarboné et renouvelable.
[3] S. Kheloufi et al. (2021): Multi-energy planning of a city neighbourhood and improved stakeholders’ engagement – Application to a Swiss test-case. Energy Reports 7: 343–350.
[4] Direction de l’énergie du Canton de Vaud (2021): Perspectives Chaleur.
Le financement conjoint de l’Office fédéral de l’énergie, des Villes d’Yverdon-les-Bains et de Lausanne, du Canton de Vaud et de la Fondation ProTechno permet la réalisation de ce projet scientifique. Les équipes de la HEIG-VD et de la HES-SO Valais-Wallis sont très reconnaissantes quant à ce soutien.
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